IYAWO ASSOCIATION

TUTUDOO : une formation-excursion féministe et décoloniale portée entre Afrique et Europe

Lomé – Cotonou – Bruxelles. Trois points reliés par une même ambition : déconstruire les préjugés, transmettre des savoirs africains et honorer les résistances culturelles. C’est tout le projet de TUTUDOO, une initiative singulière pilotée par trois structures engagées — IYAWO , NOVISSI et FEMIYA — qui entendent faire de cette « formation-excursion » un acte pédagogique, culturel fort.

En langue mina, Tutudoo signifie formation. C’est cette idée de transmission active, immersive et sensible que les organisateur·rices ont voulu incarner dans ce projet pensé comme un voyage d’apprentissage. Stylisé en TUTUDOO, avec deux « O » pour symboliser la circularité du parcours, ce programme entend aller bien au-delà d’un simple atelier.

« Malgré l’expérience coloniale, les spiritualités africaines demeurent méconnues en Europe, tout comme les dynamiques d’autodétermination culturelle en Afrique. Ce projet est une réponse à ce vide et une tentative de réparer les liens distendus », explique Elisabeth Apampa, responsable du projet et fondatrice de l’organisation togolaise IYAWO.

« C’est aussi l’occasion de parler du féminisme dans un contexte africain, de revisiter la place centrale qu’occupent les femmes dans nos traditions, nos luttes et nos récits culturels. Les femmes sont gardiennes de mémoire, actrices de transformation, et il est important de mettre en lumière leur rôle dans la transmission des spiritualités et savoirs ancestraux. »

Un itinéraire entre mémoire, transmission et réflexions critiques

Le projet se déploie autour de plusieurs escales, à la fois physiques et intellectuelles. Du Togo au Bénin, les participant·es vont s’immerger dans les réalités culturelles locales, interroger l’histoire coloniale et esclavagiste, apprendre les fondements du vaudou, explorer les aires culturelles togolaises et béninoises au-delà des prismes occidentaux, et découvrir l’histoire des résistances féminines.

« Il s’agit de se décentrer, de sortir du cadre imposé par l’histoire coloniale belge, afin de mieux comprendre les trajectoires spécifiques de nos peuples et de nos spiritualités », souligne Célestin Akpahlin, coordinateur du projet en AFRIQUE et Président de NOVISSI.

Une attention particulière est portée à la place des femmes africaines dans l’histoire, à la valorisation des artistes et artisan·es locaux·ales, et à la restitution des biens culturels africains, un débat toujours vif, notamment autour des collections de l’Africamuseum de Tervuren (Belgique), où un documentaire du voyage sera projeté en clôture.

« Nous voulons aussi que ce musée européen, qui porte le nom Africamuseum, prenne réellement en compte les histoires et cultures des pays africains qui n’ont pas été colonisés par la Belgique, et des diasporas africaines dans leur pluralité », affirme Mireille-Tsheusi Robert, co-coordinatrice et présidente de l’organisation belge FEMIYA.

« Je tiendrai d’ailleurs une grande conférence dans le cadre du projet, autour d’un thème qui me tient à cœur : Féminisme africain et européen : complémentarité ou opposition ?. Ce sera un moment fort de dialogue, de réflexion et de déconstruction entre nos trajectoires et nos réalités féministes respectives. »

Un projet ancré dans la pédagogie décoloniale

TUTUDOO se veut féministe, panafricain et décolonial, dans sa démarche comme dans sa méthode : chaque étape du parcours sera ponctuée d’apprentissages actifs, de discussions collectives, de moments de contemplation et de célébration des identités africaines.

Les participant·es auront ainsi l’opportunité d’explorer des lieux de mémoire liés à l’esclavage, de revisiter l’histoire de la colonisation franco-allemande au Togo et celle française au Bénin, tout en échangeant des perspectives avec des militant·es et intellectuel·les africain·es et européen·nes engagé·es.

« Ce que nous proposons, c’est une transmission horizontale, un échange respectueux entre cultures et savoirs, pour sortir des logiques descendantes héritées de la colonisation », précisent les organisateur·rices.

Un appel à suivre et à s’impliquer

TUTUDOO ne se limite pas à un cercle d’initié·es. Le programme est documenté tout au long de son déroulement sur les plateformes des trois organisations partenaires. Témoignages, photos, extraits vidéo, paroles recueillies… seront partagés pour que cette démarche bénéficie au plus grand nombre, tant en Afrique qu’en diaspora.

Pour IYAWO, cette initiative s’inscrit pleinement dans sa ligne d’action : créer des ponts entre les générations, les cultures, les disciplines — et surtout faire entendre des voix africaines trop souvent marginalisées dans les récits dominants.

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